Gerry McGovern limogé de JLR ?

Gerry McGovern limogé de JLR ?

Après 21 ans de carrière au sein de l'entreprise, le directeur de la création de JLR, Gerry McGovern, aurait été licencié, ce qui constituerait le premier changement majeur depuis la nomination du nouveau PDG de JLR, PB Balaji.

Mr Balaji a pris les rênes de JLR le mois dernier, succédant à Adrian Mardell, qui a occupé le poste de PDG pendant trois ans. Il est le premier PDG issu des principales activités de Tata Motors, la maison mère, à accéder à ce poste, puisqu'il était auparavant directeur financier de Tata Motors. J

 Mc Govern ? Monsieur Design...

 Le long mandat de Gerry McGovern à la tête de l'entreprise n'a pas été sans controverses, son leadership en matière de design ayant éloigné Land Rover de ses origines de constructeur automobile axé sur le tout-terrain.

De fait, l'annonce de son départ a suscité davantage de joie que de regrets au sein de la communauté des passionnés de Land Rover, fervents défenseurs du 4x4.

 Cependant, sa carrière a également propulsé l'entreprise vers de nouveaux sommets, notamment grâce à ses deux plus grands succès : le design du Freelander 1, de l’Evoque, du Range Rover et du nouveau Defender, ces 2 derniers constituant aujourd'hui les piliers du chiffre d'affaires du groupe JLR.

Si nous cherchons une explication à son départ, on peut peut-être se tourner vers Jaguar, où la présentation l'an dernier de la nouvelle identité visuelle de la marque et du concept-car Type 00 s'est rapidement transformée en un fiasco en termes médiatiques.

Nombre d'articles consacrés au limogeage de McGovern se sont concentrés sur le fiasco Jaguar, négligeant ainsi sa longue carrière chez JLR – un traitement injuste pour l'ensemble de son travail au sein de l'entreprise.

L’homme de Midlands

Originaire des Midlands, région qui, depuis un siècle, est le cœur battant de l'industrie automobile et manufacturière anglaise. Diplômé en design industriel de l'université de Coventry, il est également titulaire d'un master en design automobile du Royal College of Art de Londres.

 Il intègre le groupe Rover dans les années 1990 et signe rapidement deux modèles à succès. Le cabriolet MG-F, fidèle à l'esprit des roadsters MG classiques qui devient le cabriolet le plus vendu du pays.

 Chez Land Rover, il conçoit la première génération du Freelander, qui détrône rapidement le Discovery et devient le 4x4 le plus vendu d'Europe, une position qu'il conserve jusqu'à l'explosion du marché dans les années 2000.

Il ne participa ni au Range Rover L322, ni au LR3, ni au Range Rover Sport d'origine, conçus sous la direction de Geoff Upex, alors responsable du design. 

Il revint chez Land Rover en 2004, succéda à Upex à la tête du design en 2007 et se consacra immédiatement à la conception du véhicule emblématique de son mandat : le concept LRX, qui allait donner naissance au Range Rover Evoque de 2011.

 L'Evoque a marqué un tournant stylistique majeur pour la marque, et c'est ce véhicule qui a provoqué la colère de nombreux passionnés, qui ont fini par rejeter violemment le nom de McGovern.

 Objectivement, c'était, et c'est encore, un beau modèle ; mais à l'époque, personne n'aurait qualifié de Range Rover ce genre de véhicule.

Dans les années 2010, McGovern a orchestré les restylages du LR3 (devenu le LR4) et du Range Rover Sport, et a conçu le Range Rover L405 et le Range Rover Sport L494, qui ont étendu le changement de design amorcé avec l'Evoque à la gamme principale de modèles Range Rover.

Se posait également la question du sort du Defender, dont la survie, clairement menacée par la réglementation, était devenue incertaine dans les années 2010.

 En 2011, Land Rover dévoila le concept DC100, une vision de la prochaine étape de l'histoire du Defender, incarnée par McGovern. Ce concept fut un échec auprès des passionnés et, face à la levée de boucliers, l'entreprise fut, en théorie, contrainte de revoir sa copie.

Pendant les huit années suivantes, jusqu'à la présentation du nouveau Defender en 2019, les passionnés de Land Rover vécurent une angoissante attente quant à l'avenir de ce modèle emblématique.

Le DC100 annonçait clairement que McGovern s'éloignerait radicalement du langage stylistique des Série et du Defender classique, en vigueur depuis 68 ans.

Le produit final a connu un succès retentissant et a notamment dynamisé le milieu des clubs de véhicules tout-terrain Land Rover en Amérique du Nord.

Le Defender est désormais un moteur de ventes pour la marque, disponible dans une gamme complète allant du modèle de base quatre cylindres au Defender OCTA de 626 ch.

 Fort de son succès, McGovern a intégré le conseil d'administration de JLR, a été nommé directeur de la création, supervisant ainsi toutes les décisions en matière de design chez Jaguar et Land Rover, et a occupé un poste clé chez Jaguar.

McGovern a propulsé l'entreprise vers de nouveaux sommets avec les divisions Range Rover et Defender, mais le succès n'a pas été sans failles.

 Le Discovery 5 s'est avéré être un modèle peu vendeur pendant près d'une décennie, sans qu'une stratégie claire ne se dessine pour cette marque.

 Le relancement de Jaguar reste une grande inconnue, même si son avenir a été davantage compromis par la campagne marketing que par le véhicule lui-même.

 Le départ de McGovern laisse un vide considérable au sein du département design de Land Rover.

 Cela pourrait signifier une nouvelle orientation pour Land Rover à l'avenir.

 On pourrait assister à un retour aux lignes plus anguleuses, car la tendance générale des 4x4 s'oriente vers des formes verticales traditionnelles, et Land Rover se retrouve quelque peu à la traîne dans un segment qu'elle a pourtant initié.

 La marque pourrait également s'inspirer des codes stylistiques actuels des voitures de luxe et accentuer les thèmes chers à McGovern.

Que réserve l'avenir à McGovern ? Il pourrait conserver son siège au conseil d'administration de JLR – on ignore si son éviction (qui n'est toujours pas officiellement confirmée par JLR) inclut ce poste.

Il s'est récemment lancé dans un projet parallèle avec Norton Motorcycles, une autre marque britannique emblématique rachetée par une entreprise indienne qui s'efforce de la revitaliser.

Il sera sans aucun doute très sollicité, notamment par les constructeurs automobiles chinois qui souhaitent intégrer son expertise à leurs modèles dans le secteur en pleine expansion des véhicules électriques en Chine.

 Mais pour l'instant, c'est la fin d'une ère pour Land Rover, et l'un des tournants les plus importants des 78 ans d'histoire de l'entreprise.